Sunday, December 6, 2009

Cambodge


Une arrivée en douceur au Cambodge par un poste frontière des plus relax. Les gens sont souriants, le paysage rural, terre rouge ocre sur fond verdoyant annonce la couleur. L'aventure khmer se dévoile sous les meilleurs auspices. Un début prometteur, qui ne fait que confirmer les bons échos du dimanche énoncés par les voyageurs.

A défaut de vélo, je loue dans la foulée une moto, histoire de me familiariser avec les environs, de sortir des sentiers battus, d'être libre de mes mouvements. Mes soupçons sont confirmés, il fait bon vivre au Cambodge. La nature est reine, parsemées de maisons typiquement khmers sur pilotis, les derniers servant de pilier de hamac car la sieste est une activité réputée ici monsieur. Personne n'essaie de me vendre des bidules nuls et des machins moches, qu'on en a plein le cul, qu'on en a plein les poches... (De qui est ce ?) C'est agréable de retrouver des relations humaines non biaisées par l'argent. La religion semble importante, de nombreux prêtres en uniforme hollandais se baladent sur les chemins, par groupe de 3 si possible, va savoir pourquoi. Un groupe d'enfants tous nus joue dans la boue à se la lancer en pleine figure, c'est rigolo, mais je ne m'y attarde pas de peur qu'ils trouvent en moi une cible à leur gout. Bref, un bon air de vie plane dans l'air et s'hume à pleines narines.
Mais, car il y a toujours un met dans le repas que je vous sers, ce bon feeling va rapidement être taché par un problème qui touche particulièrement ce pays et son voisin occidental : le tourisme sexuel. On a beau se préparer à la chose, on est toujours surpris par l'ampleur du phénomène. Le premier couple, on se dit que l'amour est possible entre un sexagénaire grisonnant bedonnant et une jeune et jolie de 20 ans, mais on est tout de même très suspicieux, puis rapidement vient le 2e couple, puis toute la suite des nombres jusqu'à l'infini. Le bénéfice du doute s'efface lentement mais surement, ne laissant plus aucune chance de rédemption aux amoureux perdus dans la masse des salops.
L'apogée fut atteinte à Sihanoukville, ville qui n'a d'autres buts que celui d'asservir toute une population de jeunes femmes cambodgiennes aux étrangers de passage a la bourse pleine (avec mauvais jeu de mots...). Mais cela rapporte de l'argent dans les foyers et c'est le plus important, n'est ce pas ? Il n'y a pas de sot métier, isn't it ? (voila une expression qui arrange bien beaucoup de monde...)

C'est a la sortie de Kep et Kampot, que je rencontre la fameuse station balnéaire Sihanoukville, une étape intéressante pour prendre la température du pays. A la sortie du bus, un hôtel annonce le dortoir gratuit. Je m'y pose sans faire de bruit car tout le monde dort dans la quinzaine de lit du dortoir. Cela aurait peut être du me mettre la puce a l'oreille, il est midi. Je visite la ville le reste de la journée et suis vite déçu par l endroit, remplis de couples homme blanc femme cambodgienne et de plages privées, car tout s'achète dans notre beau monde, les plages et les femmes... Je rentre assez tard et me retrouve dans cet hôtel gratuit qui a pour vocation d'attirer le plus de touristes dans son enceinte pour ensuite y faire la fête toute la nuit en compagnie de charmantes prosti... heu... accompagnatrices en petite tenue. Il y a internet, donc je commande une bière et me pose pour y rédiger la fin de mon texte sur le Vietnam. Le spectacle du lieu détourne mon attention régulièrement. Il y a au moins une trentaine de ces jeunes dames aux mains de touristes masculins bien peu scrupuleux et irrespectueux de la gente féminine. J'en ai assez vu alors je m'échappe dans mon lit et tente de dormir sous les mégas décibels de la sono et des cris de bourrés. Nuit quasi blanche, je me réveille a 5h du mat pour attraper le premier bus direction Phnom Penh et un autre environnement plus sain, je l'espère. Les fêtards vont se coucher, ils me disent bonne nuit, je leur réponds bonjour. Je me souviendrais toujours de ce voyage en bus vers la capitale. Des touristes blancs qui jacassaient et se vantaient de leurs « conquêtes », racontant et détaillant les filles et leurs exploits. Pas de quoi être fier les gars ! Et des jeunes femmes cambodgiennes peu habillées sortant tout juste d'une nuit bien mouvementée, avec dans la main quelques billets verts gagnés a la sueur de leur corps, salis et utilisés par de bien piètres individus.

A Phnom Penh, je dois y retrouver Serge et Sophie, un couple de potos de Mumbai en vacances. A peine sorti du bus, je tombe par chance sur Serge, je le reconnais facilement par sa taille gargantuesque pianotant dans un cyber café. Il était justement en train de m'écrire pour convenir d'un rendez vous. Tsss, pas besoin, je suis derrière toi !

C'est le début d'un bon petit périple en leur compagnie.
Pour la premiere journee dans la capitale, je commence seul au lever du jour par le best of du menu touristique, notamment le palais royale et son trop plein d'or.
Puis je rejoint les friends pour la suite de l'aventure, une page d'histoire de l'humanite... pas tres jolie...
Il est minuit passe, la journée fut dure et éprouvante, alors je devrais être assommé et dormir comme une tombe. Mais non, elle fut trop chargée en émotion, je n'arrive pas a fermer l'œil, la conscience et l'inconscience travaillent dans ma petite caboche, il est difficile de rester de marbre face au démon qui sommeille en chacun de nous et qui s'exprime avec une telle violence dans ces actes insensés. La journée Khmers rouges m'a mis à terre... Tout d'abord, nous avons commencé par une visite de la prison S21, transformée en musée commémorant la vie des détenus, torturés et exécutés, de passage en enfer.

On suit le parcours des prisonniers jusqu'au bout et arrivons aux fosses communes, 15 km plus loin, d'ou se dresse une grande stupa bouddhiste remplie de 8000 cranes humains entreposés en cet endroit pour rappeler a l'humanité les dérives possibles de ses actions.

Et pour finir, dans la même lignée, nous visionnons un film retraçant l'aventure terrible de journalistes cambodgiens, américains et français à l'époque maudite de Pol Pot... Donc je ne dors pas. ¼ de la population cambodgienne fut décimée pendant ces 4 terribles années. A la fin du règne Angka, la population était composée de 70% de femmes. Les bébés des parents tués subissaient le même sort pour éviter de faire des futurs rebelles. On les supprimait en les tenant par les pieds et en les frappant contre un arbre. Comment peut on avoir le cran de faire cela a un nouveau né ? Et les tortures ? Et les morts lentes car il fallait éviter de gaspiller des balles si précieuses ? Et après les horreurs de la 2eme guerre mondiale, les USA et les Nations Unies, nos grands héros défenseurs des libertés et des opprimés, soutiennent les Khmers rouges dans leur lutte contre les vietnamiens, tout en ayant connaissance des massacres, simplement parce qu'il fallait combattre les Viets qui symbolisaient a l'époque le communisme et la lutte de pouvoir contre le bloc soviétique. Peu importe les civils cambodgiens dans cette affaire. Ne sommes nous pas tous des assassins dans cette histoire ? Et le bombardement secret du Cambodge pendant la guerre du Vietnam, car certains Viêt-Congs se cachaient dans la campagne avoisinante, tuant 250 000 civils cambodgiens qui n'avaient rien demandé a personne, mais a qui l'on a servit tout de même une bonne soupe de bombes made in USA. Y aurait il pu avoir un lien entre cette tuerie orchestrée par les américains et leurs alliés et la brutalité des Khmers rouges qui haïssaient et supprimaient tout ce qui pouvait symboliser l'Amérique ? Non ! Bien sur que non ! Les cambodgiens sont juste sanguinaires comme cela, par nature, c'est surement dans les gènes... Il ne faut surtout pas dire que la rage des cambodgiens ait quelque chose à voir avec la tuerie gratuite donnée par les donneurs de leçons que nous sommes. Et la guerre en Irak, qui il y a 3 ans, alors que je vivais a Vancouver, avait déjà fait 750 000 morts irakiens, j'ai perdu le décompte depuis, et je crois que tout le monde l'a perdu, sauf le décompte des américains car il est bien connus qu'un américains vaut bien au moins 100000 irakiens en terme d'importance. Personne n'a propose dans notre gouvernement de faire une minute de silence pour ces vauriens d'irakiens qui meurent tous les jours... alors que le 11 sept... alors la ! Il fallait surtout la faire cette minute... Donc s'il y a de plus en plus de fous d'Allah prêt a se faire sauter au nom de dieu, ce n'est surement pas a cause de nos actions... d'ailleurs il faut frapper encore plus fort, et pourquoi pas bombarder l'Iran ou un autre pays démoniaque car on a des bombes a revendre et il faut bien les utiliser pour faire fonctionner nos industries...
Oups, je m'égare de plus en plus. Arrêtons-la ! Mais que penser quand on voit toutes ses terribles choses que l'on est capable de faire... Comment peut-on encore se sentir supérieur, penser que la race humaine est l'élue des Dieux ? Les Dieux que l'on nous décrit choisiraient ils vraiment au sommet de leur hiérarchie ou de leur préférence des êtres capables d'atrocités pareilles envers eux même et envers le reste de la nature, envers tout le reste des espèces animales que nous décimons sans sourciller, ou alors si quand même, faisons un peu de recyclage, c'est bon pour l'environnement et cela donne bonne conscience, mais je consomme toujours autant, je conduis toujours ma grosse voiture. D'ailleurs j'ai vu voila une semaine de cela un article dans le monde qui s'alarmait de la baisse de consommation pour les fêtes de Noel, tout cela a cause de cette méchante crise, mais pas a cause d'une prise de conscience des gens qui peut être un jour pourrait se dire qu'ils n'ont pas besoin de 25 paires de chaussures, 53 pulls, 4 télés, 45 jouets (car c'est pareil pour les gamins), 3 voitures, 4 maisons, et que toute cette surdose consommatrice détruit la planète... Achetons, achetons pleins de cadeaux a Noel, au nouvel an, a la St Valentin, a Pâques, a la fête des mères, a la fête des pères, a la fête des grand mères, pour les anniversaires, pour les bébés qui naissent, pour les crémaillères, pour les voyages... et puis pour le plaisir aussi, c'est bon pour l'économie. Alors, aller les gens, il faut consommer encore plus, qu'est ce que vous faites de votre temps libre ? Ah vous n'en avez pas ?
Il y a des jours comme cela... Il faut garder confiance en la nature humaine, elle est capable de faire de merveilleuses choses... mais la je ne vois pas trop...
You gotta stop ! before... C'est un récit politiquement correct alors vous mettez ce qui vous arrange a la place des 3 petits points. C'est l'effet Aretha qualité filtre.

Apres cette journée forte en émotion, nous décidons de poursuivre notre chemin vers la cité des dieux, le temple des temples, le joyau de la couronne, que même les Khmers rouges, ils ne l'ont pas détruit, c'est dire le respect qu'impose le nom d'Angkor.

Je retrouve mes amis Shiva et Vishnu que j'avais abandonné lâchement en Inde, mais qui ont plusieurs grandes maisons près de Siem Reap. Elles sont un peu en ruines, mais c'est la faute au temps qui passe car avec le temps, va, tout s'en va ! Le tout reste grandiose, le domaine s'étend sur des kilomètres que je parcours à vélo (J'avoue avoir triché quelque peu grâce à mon complice Sergio).

Le seul inconvénient, c'est que mes 2 potes dieux hindous ont beaucoup d'autres amis, et ils en invitent 2 millions tous les ans, donc on se sent un peu moins spécial et un peu trop noyé dans la masse. Il est même parfois difficile d'entendre le silence de mes 2 hôtes car leurs visiteurs sont bien souvent peu respectueux de la paix et de l'harmonie qui règnent en ces lieux uniques et anciens. C'est pour retrouver cette ambiance perdue que nous décidons de rester, avec Serge et Sophie, un petit peu de nuit dans le temple le plus charismatique du complexe. Les dieux nous récompensent en nous envoyant leurs 2 plus beaux fantômes qui vont pour quelques minutes nous exécuter une danse macabre au milieu des ruines. Un spectacle grandiose et effrayant, mais nous en sortons indemnes.

C'est enfin vers Battambang que nous nous dirigeons, en bateau à travers des paysages pittoresques et charmants. Cela nous redonne du baume au cœur après s'être fait avoir comme des touristes bleutés avec des places relativement chères pour n'avoir pas de place assise. Le soleil nous brule, le paysage rayonne de beauté.

Battambang est la deuxième ville la plus grosse du Cambodge, mais elle nous apparait sous les traits d'un village. Les gens sont adorables et le temps a ralenti pour laisser les habitants vivre à leur rythme. Il n'y a presque pas de voiture, c'est une condition nécessaire aux charmes de la ville et a la paix qui y règne. On décide de louer une moto le lendemain pour parcourir les environs de ce bel endroit. Mais une glace peu catholique m'a torturé l'estomac toute la nuit ne me laissant que très peu de repos entre les nombreux passages aux toilettes. Au petit matin, mon état n'a pas changé, je me dois de rester très proche de la cuvette et abandonne mes amis à l'exploration. Ils ont passé une excellente journée à arpenter les chemins du paradis. De mon cote, je patiente et philosophe en me disant que cela fait partie de l'aventure et que j'irais mieux demain... Malheureusement, ce devait être la dernière journée passée en compagnie de Sergio et Sophie. Raté ! Mais j'aurais tout de même bien profité de leur agréable présence pendant ce périple cambodgien. Ils ont été adorables pendant cette pénible journée, faisant des arrêts a mon hôtel pour prendre de mes nouvelles, me réconforter, m'amener des médocs, un copieux repas... Merci les amis.
Le lendemain, je retrouve Mehdi, un breton rencontré au Vietnam. Je tente le vélo en sa compagnie, mais après 10 minutes d'efforts je rentre en urgence à l'hôtel, toujours pas guéri apparemment... Il me retrouve plus tard et je retente la sortie, mais rebelote. Cette fois, je décide de me cachetonner a l'antibiotique, ce n'est pas automatique, mais quand le corps ne se répare pas tout seul, alors il faut lui donner un petit coup de pouce.
C'est sur cette note médicale que je termine mon voyage khmer, j'en garderais un souvenir fort, rempli d'émotions contrastées. Les cambodgiens sont des crèmes, le cœur sur la main et le sourire aux lèvres. Difficile de mettre ces visages en parallèles avec les massacres commis, avec les atrocités qui ont germées dans ces mêmes caboches.

Mais il n'y a pas de secret, l'homme est capable du meilleur comme du pire, et comme disaient les inconnus, c'est dans le pire qu'il est le meilleur. Cambodgiens, allemands, américains, français, congolais... on est tous sur le même bateau, et on réagit tous de façon extrême quand le pire arrive et que l'ignorance règne. L'important à présent c'est d'agir pour que cela ne se reproduise pas... et pourtant... que fait-on ? On détruit notre système éducatif sous prétexte que ca coute trop cher. On assomme les gens avec des programmes télés idiots et abrutissants. On lance des guerres sous de faux prétexte de lutte antiterroriste... Ahhh... cette maudite race humaine ! Va-t-elle un jour être digne de toutes ces autres belles choses qu'elle représente ? L'avenir nous le dira, mais la en ce moment... je n'ai pas trop confiance...